"Considérant qu'aux termes de l'article 34 de la Constitution, la loi fixe les règles concernant les droits civiques et les garanties fondamentales accordées aux citoyens pour l'exercice des libertés publiques; qu'il appartient au législateur d'assurer la sauvegarde des droits et des libertés constitutionnellement garanties; que s'il peut déléguer la mise en oeuvre de cette sauvegarde au pouvoir réglementaire, il doit toutefois déterminer lui-même la nature des garanties nécessaires;" (...)
"Considérant que la loi [du 7 juin] a confié au Conseil supérieur de la télématique le soin d'élaborer et de proposer (...) des recommandations propres à assurer le respect par certains services de communication de règles déontologiques, sans fixer à la détermination de ces recommandations, au regard desquelles des avis susceptibles d'avoir des incidences pénales pourront être émis (...); qu'ainsi le législateur a méconnu la compétence qu'il tient de l'article 34 de la Constitution".
BILAN:
L' "amendement Internet" de la loi Fillon a donc été bel et bien précipité. Un communiqué de François Fillon a pris acte, un peu amer, de la décision du Conseil, puisque les services du ministère préparaient des décrets d'application sur les conditions de contrôle du CST, à l'aide notamment du rapport commandé à Mme Falque-Pierrotin. Mais selon M. Fillon, ce n'est que partie remise : "Je ferai d'autres propositions conformes à l'avis du Conseil Constitutionnel."
Le plan annoncé par la division Infosec propose de lancer des expériences en vue "d'identifier, de définir ou de vérifier ... les aspects opérationnels, techniques, réglementaires et légaux afin de déduire l'efficacité, la gestion et l'acceptabilité des services de tierces parties de confiance". Ce sont des travaux préparatoires pour tester un réseau européen de tiers de confiance (ETS).
La Commission indique que des appels d'offres ont été lancés pour tester les méthodes, et que les travaux pourront commencer dès janvier 1997.
Néanmoins, certaines sources européennes indiquent que ces "travaux préparatoires risquent de servir à imposer la technique du key escrow". Rappelons que les USA tentent d'imposer le principe dans le cadre des discussions de l'OCDE (club des 27 pays les plus riches), alors que la France et le Royaume-Uni ont ouvertement déclaré qu'ils créeront sur leur sol des TTP. Mais le Japon, l'Australie, les pays nordiques comme la Suède, la Finlande et le Danemark se sont dernièrement déclarés hostiles à une telle politique, craignant d'instaurer un système d'écoute généralisé.
A noter que le 30 juillet le groupe du G7 a voté une déclaration de principe visant à "accélérer les consultations sur le chiffrement qui donnerait, quand nécessaire, l'accès légal des gouvernments aux données et communications de manière à enquêter sur les actes de terrorisme, tout en protégeant l'intimité des communications légitimes." D'autres dispositions plus restrictives ont ont failli être imposées sous la pression américaine.
A noter qu'en France cette décision du G7 a servi de baptême du feu à Citadel (Citoyens associés pour la défense des libertés), qui se présente comme la "cousine française" de l'EFF américaine. Bon vent.